Poésie : Testament

Publié le par Pivot

Testament

 

 

Puisque nos 20 ans sont négociables sur le marché du travail comme autant de têtes de bétail, je propose l’aversion subtile. Noyade des grands animaux, noyade mon pauvre cœur dans les sucres alcoolisés, dans les cristaux qui paralysent ma main, oserais-je parler ?

« Puissant Monarque, permets-moi de mourir ! »

Mais Puissant Monarque est paresseux, accepter mon suicide lui causerait bien des tracas, des paperasseries bureaucratiques. Et Puissant Monarque me congédie de la main.

Je part mécontent de la réponse de Puissant Monarque. Puissant Monarque est méchant, et je me passerais de son opprobre. Puissant Monarque est laid, très laid, les bras comme les yeux recouverts de graisse confite, et Puissant Monarque n’aime que se faire masser par des princesses chinoises en buvant des vins longs.

Dans les caves du Vatican vieillit le vin péniblement.

« Des vins violets et antiques

et de longs figements statiques

parcourent leurs robes vermeilles

très doucement s’y ensommeillent ! » : ainsi rédige le poète des vins de Puissant Monarque. Puissant Monarque est méchant et emploie de mauvais poètes. Moi qui ne suis que poète d’amour ne l’ai jamais servi.

Dorment aussi dans mon cou des liqueurs vertes aux songes larges et ouverts qui se souviennent avoir frémi au massacre de Tienanmen.

Comme une bibliothèque noble, le portier de Puissant Monarque fait résonner ici les échos des rires appuyés par le vin, des ivresses rouges. Il est réellement saoul comme un Porlonais. Et d’ailleurs il vient de Porlogne, que Puissant Monarque a conquite d’un clignement d’œil. Puissant Monarque s’ennuie et alors il empale les singes approfondis, les danseurs de bal et les femmes. Il se régale, il crie « Encore ! Encore ! Accor’ ! » et il s’ennuie à nouveau, il dit : « Cessez donc d’importuner ces pauvres danseurs de bal qui ne vous ont rien fait. » Mais contrairement au Pape, Puissant Monarque sélectionne les pilules avec soin ; une pour les jeunes filles, une pour les vieilles mères, et aucune pour ses tendres beautés puisqu’il est inconsistant. Il fait aussi couper la tête à tous les beaux garçons que lui dénoncent ses maigres conseillers. Moi, ce n’est pas pareil, il m’aime bien, mais parfois je l’ennuie. Il me dit : « Va jouer ailleurs ! » et il m’offre des drôles de jouets : des trains pas méchaniques que je doit faire bouger à la force de mes doigts, ou des poupées ignobles qu’il faut voiler d’un tchador islamique.

Ainsi donc je voulais que cela cesse et Puissant Monarque me le refusait. « Tu es embêtant à la fin ! Tu as toutes les plus belles femmes à tes pieds et tu veux en finir avec la vie ! Mais tu es le seul de mes citoyens qui paye correctement ses impôts ! Moi-même je triche sur ma déclaration fiscale… » « Tu es bête comme un pied », me disait il encore. « Que te faut-il de plus ? Le Daguerstan ? Je te l’archète… » Et il alla à pied – fait rarissime ! – à la bourse des planètes. J’en profiterais probabliblement pour m’enfuirationner. Puissant Monarque est aussi parfois très bête.

Sous le pont du fleuve Amour je pleurais. Des larmes roses et vertes me dévoraient l’amen. Vint s’approcher une de mes amours. « Pourquoi pleures tu ? » me disait-elle. Je lui répondais que probablement la source de mes larmes était à trouver dans la conjoncture économique actuelle, et aussitôt elle s’entrepris de négocier avec les nuages la source de la perte de profitabilité du vent et la cause de l’alternance semi-horaire de la crise économique et pétrolière avec la plus éclatante et la plus parfaite des reprises kénésiennes. Elle en vint très rapidement à la conclusion grotesque que le chômage exaltant était dû à l’agencement des planètes, par le biais de l’oligarchie que Puissant Monarque avait crée dans les affaires pétrolières et innées de soûle sens, alors qu’elle était à trouver dans la source même du vent, décroissance endogène.

Elle avait passé son bras autour de mon geste défait, et à présent je sentais le souffle de sa lèvre sur mon nom. Pris soudain d’une impossible envie de délirer son nom en gerbe de printemps, j’ai posé sur son cheveu le plus ténu ma main entière frémissante et elle a bondie comme un chat sauvage qu’on aurait noyé d’eau. « Tu as du faire un geste d’erreur ! Le monde sait très bien que tu es amoureux de Boucles d’or ! »

Puissant Monarque n’aurait pas dit mieux, or Puissant Monarque est très bête .

Et elle s’est à nouveau allongé à mes pieds, je me suis mis à hurler au possible. « Putain bordel de cul de merde ! » Elle m’a seulement répondu « Tu en as fait de plus beaux, de poèmes. » Elle ne riait pas. Pourquoi faut-il que toutes mes splendeurs accoutumées soient persuadées de mon désintérêt à la chose ?

Elle soupirait toujours. Tout juste n’a t’elle pas ajouter « Mais pourras-tu un jour m’aimer ? » J’en étais fou.

Probablement un Rubicond se franchit seul sur mon visage, alors. Alors car il passa des monstrueuses blêmitudes à travers mon corsage, et mon souliers soudain se mirent à gémir. « Papa, Papa, Maman, on a faim ! » Je suppose qu’ils désiraient de la boue ; alors j’ai sauté dans la plus pure et la plus grande des flaques et je m’y suis noyé. La flasque était très vaste et très visible, à travers l’alcool sémillant d’un ogre très tribun que Puissant Monarque avait d’ailleurs fait dévorer, j’ai nagé sans branchies parmi les poissons. De vastes ailes larges comme des baies vitrées m’avaient poussées de la tête à l’ultime orteil, et l’air pur de la nuit absente me grisait. Mes amourettes et mes amourettes nageaient rangées en rang serrés, à mes côtés, rangées par ordre de croissance. J’étais ravi de ces amours hallucinés ! Pourquoi pas possible ? Et la branchie des poissons était le plat du jour au restaurant de Roi Neptune où probablement Puissant Monarque n’était jamais allé. Boucles d’Or y était resplendissante de saveurs et de flux d’océan qui transféraient la rougeur du corail sur ses seins, vastes soupirails. Des soupirants amanrphosés attendaient la Reine des Fées qui prenait alors du bon temps avec le charmant officiel de la Reine des Neiges. Nous n’étions même plus au restaurant, nous lisions Poisson-Match. Je complimentais Boucles d’Or pour ses bijoux très parfumés – parfumés du parfum des charmes – et elle n’entendait rien, ayant été victime d’un speelbound très bien réussi et très fortement préparé par une sorcière qui balançait ses hanches mal contrôlées, son cul sautillant, frétillant comme une grenouille mal arrimée. Elle était jalouse tout simplement de sa beauté, ce qui arrivait à environ l’entière totalité des fleuves prétentieux et des femmes réelles.

Puissant Monarque était très laid sur les portraits qu’on affichait de lui dans l’antichambre.

« Le Prince Harry s’était probablement habillé en Asie, d’où le nombre d’africa corps qui le jonchaient. », lisait on dans Poisson-Match, avant de pouvoir aller au toilettes. Je ne sais si cela faisait référence au tsunami ou au bal masqué.

Enfin, j’étais mort, c’est du moins ce que je prétendais, car les oracles belges n’étaient pas tous d’accord sur mon état divinatoire. Ils étalaient le vin de Moselle et les cuisses des filles à loisirs, les sectionnaient avec des cutters anguleux, pour parvenir à fixer mon destin comme une carte d’état-major.

Nous étions fort loin du siècle.

 

extrait d'"Un Loup noir absolu dans nos pauvres maisons"

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