Poésie : Le temps décapité
Ce sont les faux beaux jours vite décapités
Avec ma bouche nue qui tant aurait voulu
Rassurer d’un vieux fruit l’idole vermoulue
De mes yeux blancs crevés de vaines cécités
Le printemps qui s’est tu à la saison nouvelle
Perdu de son courage aux nerfs éparpillés
J’ai le cri sur le front comme un palais pillé
Mes flammes invisibles sont pourtant plus cruelles
Je donnerais ma main moi pour être amoureux
Donner à une oreille ’’ma lune’’ ou ’’mon oiseau’’
Glisser dans le matin après la nuit d’appeau
Où l’émoi rimerait avec les coeurs heureux
C’est le printemps qui tait ses premières chaleurs
Avec son faux soleil vite décapité
Qui vient s’éparpiller dans mes yeux cécités
C’est l’audace incongrue du clou sur ma douleur
Sur la planche de bois de ces jours imparfaits
Ma bouche bave encore du dernier souvenir
A part craindre et gémir, craindre et gémir encore
Ma parole est un corps qui ne sait s’efforcer
C’est surtout par le temps des printemps immobiles
Que ma foi douloureuse aux cendres palpitées
S’est tant démise à nu qu’elle a décapité
La promesse possible d’une future idylle
C’est le refus d’un temps Le matin plus amer
La poire au goût pourri Le dernier fruit de mer
C’est mon goût suspendu à l’idée d’un sourire
Que je n’ai pas croisé depuis les jours du fuir.